Cours universitaire sur le renseignement et l’armée

Du 2 au 6 octobre, le cours universitaire intitulé « Renseignement et armée » s’est déroulé à La Haye, aux Pays-Bas. Cet événement était organisé par la Faculté des sciences militaires de l’Académie de défense des Pays-Bas (NLDA) et soutenu par le Service du Renseignement et de la Sécurité Militaires néerlandais, dans le cadre du Collège du Renseignement en Europe. Environ 30 officiers de renseignement issus de 15 pays membres du Collège ont participé à ce cours.

Le récent conflit en Ukraine et les événements tragiques survenus en Afghanistan à l’été 2021 illustrent clairement l’environnement complexe dans lequel les forces militaires doivent opérer. De manière générale, l’environnement dans lequel les armées occidentales opèrent a été défini comme de « nouvelles guerres »[i], des conflits hybrides ou encore des conflits de la zone grise. Ils se caractérisent par différentes combinaisons d’acteurs étatiques et non-étatiques et de menaces qui brouillent la distinction entre paix et guerre. La stabilité est menacée par des déplacements massifs de population, des institutions économiques, politiques et sociales fragiles ou défaillantes, des violences aléatoires et systématiques contre les non-combattants et une anarchie généralisée. Comme l’a démontré la guerre en Ukraine, cela n’exclut pas une guerre militaire régulière. Pourtant, il existe une confusion entre les rôles et les domaines du renseignement national et étranger, civil et militaire, ainsi qu’entre les niveaux stratégique, opérationnel et tactique de la guerre. À ces défis s’ajoutent les nombreuses innovations qui surgissent très rapidement et influencent la manière dont les organisations militaires mènent leurs actions de renseignement.

C’est ainsi que les gouvernements dépensent de grandes sommes dans le renseignement pour soutenir leurs armées aux niveaux tactique, opérationnel et stratégique. Cela se produit dans de nombreux domaines de mission différents, à l’extérieur comme à l’intérieur de leurs frontières, et dans des contextes très divers, notamment la lutte contre le terrorisme, la sécurité intérieure et les opérations de paix et de stabilité. Toutefois, la recherche n’a, dans l’ensemble, accordé qu’une attention limitée aux relations entre renseignement et armée. De ce fait, les principales revues académiques du renseignement ne publient qu’occasionnellement sur ce sujet[ii]. Il semble que peu de choses aient changé depuis que Michael Handel[iii] a souligné que « les histoires militaires les plus exhaustives évoquent à peine la contribution importante des activités de renseignement ». Dans les universités et universités de défense, ce sujet ne reçoit également pas beaucoup d’attention. De leur côté, les écoles de renseignement militaire se concentrent principalement sur la fourniture d’outils et de techniques pratiques, telles que des techniques analytiques ou des mesures de contre-espionnage.

Ce cours cherchait à combler cette lacune en réfléchissant au rôle du renseignement au sein de l’armée et en fournissant de nouvelles perspectives conceptuelles et empiriques. Il s’est déroulé autour de cinq thèmes : « Le renseignement de défense en soutien au renseignement stratégique », « Le renseignement militaire en soutien aux opérations militaires », « Contrer les menaces hybrides », « Technologie et innovation » et « Le rôle du renseignement dans le conflit russo-ukrainien ». L’objectif principal de ce cours était de rassembler des praticiens du renseignement et des experts universitaires pour engager un dialogue de fond. Cela a stimulé le développement des connaissances et une compréhension plus approfondie sur le thème du renseignement et de l’armée. Au cours de chaque session, de larges périodes ont été consacrées à l’échange de perspectives, d’expériences et d’idées. Un élément important de ce cours était l’interaction. Outre les pauses café et déjeuner, le programme proposait une visite guidée sur le terrain, à La Haye, ainsi que plusieurs dîners en commun qui ont permis de poursuivre les discussions dans un cadre informel. A l’issue de ce cours, les participants ont souligné l’intérêt de ces échanges tant formels qu’informels, contribuant ainsi avec succès aux objectifs du Collège visant à développer une culture commune dans le domaine du renseignement en Europe et à favoriser la compréhension mutuelle.


[i] Mary Kaldor, New and old wars: Organized violence in a global area. Third edition. (Stanford: Stanford University Press, 2012).

[ii] Sebastiaan J.H. Rietjens, “Intelligence in defence organizations: a tour de Force,” Intelligence and National Security, Vol. 35, No. 5., 2020, p. 717-733.

[iii] Michael Handel (ed.), Intelligence and Military Operations (Abingdon: Routledge, 1990), pp. 74.